LA VULNÉRABILITÉ

Tant d’attentes pèsent sur nous.

Au travail, il s’agit d’être compétent, efficace, performant. Une mère de famille se doit d’être polyvalente, organisée, bonne cuisinière, aimante et pédagogue. On attend d’un étudiant qu’il soit engagé, curieux, discipliné.
Un homme devrait être sûr de lui, fort, fiable, une femme attirante physiquement, intelligente, et… n’en jetez plus !

La société nous demande d’être parfaits et mieux encore, avec décontraction. Quand ce n’est pas le fait de l’entourage, nous réalisons que nous portons en nous un petit dictateur exigeant qui nous pousse à être fort, à faire plaisir, à réussir…

Pour être à la hauteur de ces attentes extérieures ou intimes, ou pour donner le change, une stratégie copieusement employée est de se forger une image publique gratifiante : « employé modèle », « chrétien engagé ».

Une image qui a sans doute le mérite de sauver les apparences, de nous éviter la honte et la peur du rejet, mais qui entraîne un surcroit de contrôle, de stress et d’inaccessibilité.

Comment garder une bonne estime de soi alors que ce que nous sommes ne semble jamais suffisant ? Au fond, comment survivre à toutes ces pressions ?

L’apôtre Paul nous offre une piste inédite et à contre-courant des valeurs dominantes de notre société : « Quand je suis faible, c’est alors que je suis fort. » (2 Cor 12, v10).

Quel renversement ! Paul suggère de laisser tomber la carapace d’homme fort, de femme parfaite. Il semble avoir fait une découverte immense, qui paraît de prime abord être un paradoxe : se montrer vulnérable est source de force.

Etre vulnérable, ce n’est ni de la lâcheté, ni de la faiblesse, ni de la fragilité. C’est sortir de l’illusion de la toute-puissance, accepter et embrasser la condition humaine dans son ensemble : « je suis faillible, imparfait, mortel… et j’ai de la valeur. »

Se montrer tel qu’on est, sans masque. C’est cela, être vulnérable.
Oser être soi, seulement soi, et complètement soi.
Connaître et reconnaître ses limites, accepter d’être imparfait. Pouvoir dire : « Je ne sais pas. »

Connaître et reconnaître ses besoins. Oser dire au travail, « J’ai besoin de repos. »

Vivre ses émotions au lieu de les cacher… lâcher prise, être vrai.

Avoir de la compassion pour soi et pour autrui. S’accepter avec ses failles, s’aimer… être bon et doux.

Faire le choix de la vulnérabilité demande du courage, car c’est une mise à nu de soi. Cela implique un réel risque, car cette attitude met en péril la maîtrise de l’image de soi idéale, et l’image que les autres se font de moi… mais c’est tellement libérateur et bienfaisant ! Un poids immense tombe des épaules : « Je n’ai plus besoin de jouer un rôle, d’être parfait en tout temps. »

Ce que Paul expérimente est possible, car Dieu lui a dit auparavant : « Ma grâce te suffit » (2 Cor 12, v9). Il sait qu’il a de la valeur aux yeux de Dieu, qu’il est immensément aimé. A partir de cette certitude, comme Paul, je peux tout supporter, je peux survivre à la honte, à l’échec. Je peux être moi, vulnérable, avec mes dons et mes défauts… m’aimer et être aimé ainsi.


Référence : « le pouvoir de la vulnérabilité », René Brown, 2014, éditeur Guy Trédaniel.

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